Evain avait besoin de se détendre. Pour de vrai, pour de bon. Entre le travail, ses parents, tout ça… Et surtout Judith et son embryon… Non. LEUR embryon. A tous les deux ! C’était bien ça le problème, d’ailleurs. Franchement, est-ce qu’Evain avait une tête de papa ? Non. Il n’avait même pas une tête de grand frère, ni rien. Il avait une tête d’Evain, c’était tout et déjà bien assez. Alors voilà. Maintenant, il se promenait. Avec ses deux… Pokémons. Oui. Evain était tombé dans le bain de ces trucs bizarres, un peu… par hasard. Ou par malchance, selon les points de vue. Au départ, il y avait eu Poisse, justement. Ce Pokémon, héritage d’un défunt de l’hôpital – paix à son âme -. Evain se l’était alors juré : plus jamais il ne se ferait avoir de la sorte.

Mais c’était raté. Quelques semaines plus tard, Evain s’était de nouveau retrouvé avec une de ces bestioles sur les bras. Cette fois, c’était un cadeau – empoisonné, d’ailleurs – de ses collègues. ‘Pour tenir compagnie à ton poisson, là’. Merci les potes. Il ne savait pas ce qui était le pire, dans l’histoire : qu’il est réellement accepté le cadeau, ou que ses crétins de collègues avaient été cherché un œuf de Pokémon juste pour le faire chier. Après réflexion, ils l’avaient sûrement trouvé comme le premier, dans les affaires d’un défunt sans famille. C’était profondément glauque, d’ailleurs. Piquer des Pokémons à des macchabés. Même, c’était carrément dégueulasse. Mais passons. Ce qui était fait, était fait. Et maintenant, Evain était là, à se promener dans un coin isolé. Avec ses bestioles. Poisse et Grelot. Au final, c’était comme promener son chien. Ses chiens. Ses trucs bizarres et colorés. Ils semblaient presque s’attacher à lui.

Il soupira et donna un coup de pied dans un caillou, qui alla rouler plus loin. Grelot alla courir après ce dernier, bruyamment… Evain le suivit du regard, presque attendri… ou exaspéré.

On pourrait résumer la vie d’Evain à un enchaînement de catastrophes, de malchances, d’évènements ridicules et improbables. A croire qu’il ne pouvait plus apprécier une simple balade tranquille, sans que quelque chose ne lui tombe dessus. Quand je dis dessus, c’est littéralement, dessus. Il sentit un poids tomber sur sa tête. Un poids trop lourd, qui appuya sur ses épaules et le faire tomber en avant. Il s’écrasa sur le ventre au sol, s’écorchant les mains et les genoux au passage. Le poids bizarre sur son dos en revanche, roula sur son dos et tomba à côté de lui. Lorsqu’il vit l’espèce de chenille immense bizarre le fixer à son niveau, il sauta sur ses pieds. C’était quoi ce truc ??? Quelle question… Un Pokémon, bien sûr ! Toujours la faute aux Pokémons !

Il grogna, regardant les deux siens s’agiter à côté de lui. Il avait déjà vu cette situation à la télé. Un combat de Pokémon, c’est ça ? Il les fixa, haussa un sourcil. C’était comme les chiens, non ? Il leva le bras, indiqua l’affreux insecte se mouvant face à lui, le provoquant visiblement – ou pas, mais Evain était un pauvre type persuadé que tout le monde était contre lui -.

« Allez, attaquez, faites je sais pas quoi… Putain, j’ai pas reçu de manuel moi… Je devrais peut-être prendre des cours avec Judith un jour… BON. Attaquez… S’il-vous-plaît ? Je vous achèterais des trucs sur le chemin du retour. Promis. »

Il avait tellement l’air d’un parfait idiot… Au moins, à part les Pokémons, personne ne le verrait… Du moins il l’espérait. Est-ce que les Pokémons avaient une bonne mémoire ? Non, Evain, ne divague pas enfin ! C’était une question de vie ou de mort là ! Ouais, les Pokémons pouvaient bien le tuer, regardez cette gamine-là, butée par son propre Pokémon ! Bon, certes, là, Evain n’était certainement pas en danger de mort. Mais quand même. Il baissa la tête vers ses deux bêbêtes d’amour – même Evain commençait à les trouver attachants, c’était pour dire -, et ces derniers lui rendirent son regard, sachant visiblement mieux que lui ce qu’ils devaient faire. Poisse se plaça en avant, confrontant de ses yeux vitreux. Enfin, d’un de ses yeux vitreux, la chenille géante.